Conduites à risque et estime de soi
chez les jeunes

Chez les enfants qui montrent des comportements à risque, on observe des compétences psychosociales peu développées et une faible estime de soi. Ces comportements se situent principalement dans l'abus de substances psychoactives, la violence dirigée vers soi et les comportements sexuels à risque.(BANTUELLE, DEMEULEMEESTER, 2007)

  • L'abus de substances psychoactives licites ou illicites

Il s’agit de la consommation de tabac, d’alcool et de médicaments et aussi de la consommation de cannabis, d’amphétamines, de LSD, et autres hallucinogènes, de crack, de cocaïne, d’ecstasy ou d’héroïne. Les principaux facteurs de prédisposition et de contribution individuelle impliqués dans ces comportements ont été identifiés: avoir une faible estime de soi, souffrir d'autodépréciation, être timide, présenter des réactions émotionnelles excessives, des difficultés à faire face aux événements, des difficultés à établir des relations stables et satisfaisantes et des difficultés à résoudre les problèmes interpersonnels.

  • La violence dirigée vers soi

Cette forme de violence sous-entend les comportements suicidaires et regroupent à la fois les comportements humains, qui sont des actes intentionnels posés par les personnes dans le but de se suicider mais qui n’aboutissent pas à la mort, et les suicides. Les comportements de violence dirigée vers soi sont observés chez des personnes qui ne parviennent pas à surmonter des évènements stressants induisant une grande souffrance psychique: des faits de vie négatifs comme un conflit interpersonnel, une humiliation, une séparation, la perte d'un statut social, ou un échec. Des facteurs appelés « de protection » diminuent le risque de comportement suicidaire: l'adaptation personnelle, la tolérance à la frustration, la maîtrise de soi, la bonne estime de soi, avoir la capacité de faire face aux situations, avoir des comportements de recherche d'aide ou adaptés à la situation, avoir des attentes positives pour l'avenir, avoir le sens de l'humour, jouir d'un certain bien-être affectif ainsi que différentes sources de plaisirs gratifiants, avoir un soutien familial et social de bonne qualité, avoir des enfants, appartenir à un groupe, avoir des relations amicales diversifiées, participer à des activités communes, avoir un bon sommeil et un régime alimentaire équilibré, vivre dans un environnement exempt de drogues et exempt de moyens létaux.

  • Les comportements sexuels à risque

Par comportements sexuels à risque, on entend, d'une part, les rapports sexuels non protégés, sans aucun moyen de protection de type préservatif ou sans contraception, et d’autre part, le multipartenariat sexuel qui correspond au fait d’avoir connu au moins deux partenaires dans l’année écoulée. Il semble que l'acquisition de connaissances soit nécessaire à la reconnaissance du risque. Au-delà de cette perception du risque, une personnalité axée sur la recherche de sensations fortes est un facteur prédictif de l'adoption de pratiques à risque, tant dans le domaine sexuel que dans les autres domaines de la vie. L'estime de soi, également présente dans d’autres conduites à risque, influence le comportement des jeunes qui se conformeront aux conduites des autres, pour faire partie du groupe et être comme les autres. Cela est d'autant plus vrai que la dépendance à l'entourage est forte.

Tous les adolescents engagés dans des conduites à risque sont confrontés à des images éprouvantes qui ont à voir avec la question de leur place dans la société. Si ils n’ont pas une bonne estime d’eux-mêmes, c’est parce qu’ils ne se reconnaissent pas comme faisant partie du corps social, et qu’ils ont le sentiment que rien n’a été prévu pour cela. Derrière la question de la place, il y a celle de la reconnaissance, c'est-à-dire une question de relation, notamment à l’adulte.

Une faible estime de soi augmente la vulnérabilité aux troubles psychiques: dépression, anxiété, tendance suicidaire, troubles des conduites alimentaires, fréquence des comportements à risque. Cependant, l’estime de soi joue différemment selon les conduites adoptées. La relation de l’estime de soi à l’usage du tabac, du cannabis, à la consommation d’alcool et au jeu pathologique n’est pas la même. Plus le narcissisme est défaillant, plus l’adolescent va trouver dans les marques infligées à son corps une façon d’exister ou d’arriver à se reconnaître. L’adolescent s’attaque à sa propre peau (automutilations, scarifications), ce qui montre la mésestime de soi, l’attaque directe au narcissisme corporel et au narcissisme psychique. (FERRON, 2006)

Ballottés dans leur estime de soi, garçons et filles ont des comportements à risque extrêmement différenciés: souffrances et automutilations secrètes chez les filles, défi des autres et mise en scène de conduites à risque plus dangereuses chez les garçons. Les filles intériorisent « leur manque à être », faisant de leur corps une caisse de résonance de leur relation douloureuse au monde: maux de tête, nausées, dépressions, douleurs diffuses, pertes de conscience, spasmophilie, isolement, scarifications, ruminations suicidaires … Chez les garçons, les conduites prennent la forme d’une agression à l’encontre du monde extérieur sous le regard des autres dans une démonstration de sa virilité. L’acte traduit une souffrance mais l’incision est sublimée, magnifiée, détournée vers une signification sensée le valoriser. (LE BRETON, 2004)

Mais le trop d’estime de soi serait aussi dommageable que le contraire. Les phénomènes de racket, de violence et de criminalité seraient plus reliés à un problème d’estime de soi trop haute et irréaliste et à une incapacité à gérer ses pulsions, qu’à un manque d’estime de soi. En face de frustrations souvent irréalistes par rapport à leurs attentes, les personnes ayant une haute estime, seraient plus enclines à manifester des attitudes violentes qu’elles soient verbales ou physiques. Celles qui ont une estime de soi solide, réaliste et modérée, et qui croient réellement en leurs valeurs et en celles des autres, n’ont pas besoin d’utiliser la violence, pas plus que la dévalorisation. L’estime de soi, lorsqu’elle s’avère très faible ou très élevée, est source de difficultés et ne peut être constructive.

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